PLFSS 2025 : quels impacts pour les entreprises ?

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Lundi 10 février 2025, le Gouvernement a engagé sa responsabilité en proposant l’adoption, par la procédure de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution, de la troisième partie du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2025. Bien qu’une motion de censure ait été déposée, celle-ci n’a pas obtenu de vote majoritaire. Sauf énorme surprise, nous connaissons désormais les grandes nouveautés de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2025.

Dans cet article, nous vous proposons de revenir sur les mesures principales et sur leur incidence financière pour vos clients.

Exonération de cotisations patronales : pourquoi certains salaires vont coûter plus cher aux entreprises ?

  • En octobre 2023, la Première ministre Elisabeth Borne avait confié aux économistes Antoine Bozio et Étienne Wasmer une mission visant à analyser l’articulation entre les salaires, le coût du travail, la prime d’activité et son effet sur l’emploi. L’un des enjeux majeurs était de lutter contre la « smicardisation », un phénomène en forte progression : en 2021, 12 % des actifs étaient rémunérés au SMIC, contre 17 % en 2023. 

    Cette augmentation s'explique principalement par trois facteurs : 

    • Une hausse rapide du SMIC, alimentée par une inflation élevée depuis début 2022.
    • Des branches professionnelles qui peinent à ajuster leurs grilles salariales au même rythme que l’évolution du SMIC, ce qui entraîne des minima conventionnels inférieurs au salaire minimum légal.
    • Un système d’exonérations patronales maximales au niveau du SMIC, qui limite l’incitation des employeurs à augmenter les salaires (nous y reviendrons plus loin).

    Résultat : non seulement les entreprises hésitent à revaloriser les salaires, mais ce mécanisme pèse aussi lourdement sur les finances publiques en augmentant le coût des exonérations.

    Dans leur rapport, Antoine Bozio et Étienne Wasmer ont proposé de revoir la structure des exonérations de cotisations patronales, en réduisant leur attractivité pour les salaires au niveau du SMIC et en les renforçant pour les rémunérations intermédiaires. Ces recommandations ont été partiellement intégrées dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS), mais les débats parlementaires et les ajustements politiques les ont considérablement modifiées.

    Pour mieux comprendre ces évolutions, intéressons-nous d’abord au mode de calcul actuel des contributions patronales sur les salaires. Voici un schéma explicatif :

  • Ce dernier modélise l’évolution du taux de contributions patronales en fonction de l’évolution du salaire, pour une TPE (ce taux varie aussi en fonction du seuil d’effectifs de l’entreprise mais nous ne l’évoquerons pas ici).

    Regardons donc les différents niveaux actuels :

    Niveau 1️⃣- salaires compris entre 1 et 1,6 fois le SMIC : sur cette tranche de revenu brut, l’entreprise bénéficie de la réduction générale de cotisations patronales (autrefois nommée réduction Fillon). Par le biais de ce mécanisme, plus le salaire brut est proche du SMIC, plus le taux de la réduction de cotisations est élevé, ce qui se traduit par un faible niveau de contributions patronales.

    Cette réduction de cotisations est progressive comme le montre le graphique. Au niveau du SMIC, l’entreprise supporte les taxes d’apprentissage et de formation professionnelle, une partie de la cotisation AT/MP (pour la part supérieure à 0,46% du salaire brut), ainsi que les cotisations AGS et les contributions aux régimes de prévoyance et de frais de santé. Puis, à mesure que le salaire augmente, elle supportera une quote-part des autres contributions que nous avons listées précédemment jusqu’à les supporter intégralement lorsque la rémunération atteindra le niveau de 1,6 fois le SMIC.

    Pour déterminer le taux de réduction applicable, on utilise la formule suivante (pour les entreprises de moins de 50 salariés) : (0,3194/0,6) x [(1,6 x SMIC / rémunération annuelle brute du salarié -1]

    Niveau 2️⃣- les salaires compris entre 1,6 fois et 2,5 fois le SMIC (valeur à fin 2023) : sur cette tranche, aucune réduction générale de cotisations patronales n’est due. Cependant, l’entreprise ne supporte ni complément de cotisations d’assurance maladie (+6%), ni complément de cotisations allocations familiales (+ 1,8%). Le taux de contributions global tournera autour de 35 % auquel il faudra ajouter les coûts de mutuelle et de prévoyance.

    Niveau 3️⃣- les salaires compris entre 2,5 et 3,5 fois le SMIC (valeur à fin 2023) : sur cette tranche, on intègre les mêmes cotisations qu’au niveau 2, en ajoutant le complément de cotisations assurance maladie. Ce point est particulièrement important : lorsque le salaire brut d’un salarié va franchir le seuil de 4368 euros bruts, l’entreprise va supporter 6 % de contributions patronales en plus sur l’ensemble du salaire: le franchissement de ce seuil représente à lui seul un surcoût annuel de charges patronales de plus de 3000 euros.

    Niveau 4️⃣ - les salaires supérieurs à 3,5 fois le SMIC (et inférieurs à 8 fois le plafond de Sécurité sociale) : les cotisations applicables sur cette tranche seront identiques à celles du niveau 3. Nous y ajouterons cependant un complément de cotisations allocations familiales de 1,8%. Le mécanisme est le même que celui du niveau 3. Le surcoût lié à ce franchissement de seuil sera de 1 320 euros pour l’entreprise.

Comment le PLFSS 2025 va impacter les seuils ?

  • Le texte prévoit d’abaisser les seuils des niveaux 3 et 4 précédemment décrits.

    Baisse du seuil d’assujettissement du complément maladie : concrètement, le complément maladie sera désormais dû pour tous les salaires supérieurs à 2,25 SMIC (SMIC, pris à sa valeur de décembre 2023).

    Cela veut donc dire que tous les salaires compris entre 3931 et 4368 euros bruts (en moyenne mensuelle pour un temps complet) se verront appliquer 6 points de contributions patronales supplémentaires. Soit un surcoût par salarié compris entre 2830 et 3144 euros par an.

    Baisse du seuil d’assujettissement du complément allocations familiales : le seuil de 3,5 SMIC sera abaissé à 3,3 SMIC. Cela signifie donc que les rémunérations brutes mensuelles moyennes comprises entre 5765 et 6115 euros bruts se verront appliquer 1,8 point de contributions patronales supplémentaires, soit environ 1200 à 1300 euros de surcoût par salarié concerné par an.

    Nous vous proposons une synthèse de ces évolutions dans la présente infographie :

  • Ces mesures touchent donc plus particulièrement les populations cadres des entreprises. Cependant, il ne s’agit là que d’une première étape. Les exonérations de contributions patronales restent particulièrement coûteuses pour les finances publiques françaises. Il ne serait donc pas impossible de voir ces seuils encore abaissés en 2026. C’était d’ailleurs ce qui était initialement annoncé lors de la présentation du PLFSS 2025 en octobre 2024. Le coût de la masse salariale de vos clients est donc encore susceptible d’évoluer.


Prime de partage de la valeur : pourquoi le dispositif va perdre de son attractivité ?

  • Si la PPV disposait jusqu’à présent d’un régime de faveur, elle risque de perdre de son attrait pour de nombreuses entreprises.

    Pour quelles raisons ?

    Actuellement, pour calculer les exonérations de cotisations patronales, on prend en compte l’ensemble des rémunérations brutes du salarié. Plus la rémunération est basse, plus l’entreprise bénéficie d'exonérations importantes.

    Pour optimiser ces exonérations, les entreprises ont donc tout intérêt à verser des compléments de salaire via des dispositifs qui ne sont pas intégrés dans le calcul des exonérations patronales. Ainsi, les salariés perçoivent un revenu supplémentaire sans que cela n'affecte les exonérations de l'entreprise. La prime de partage de la valeur (PPV) est l'un de ces dispositifs.

    En 2023, plus de 5,3 milliards d’euros de PPV ont été distribués, sans impacter le montant des exonérations patronales. Mais l’article 6 du PLFSS 2025 inclut désormais cette prime dans l’assiette de calcul des exonérations patronales.

    Concrètement, qu'est-ce que cela change ?

    Inclure la PPV dans l’assiette de calcul des exonérations patronales a une incidence sur le montant des exonérations dont l’entreprise pourra bénéficier.

    Dans quelles proportions ?

    Prenons l'exemple d'une prime de 800 euros versée à un salarié au SMIC. L’impact pour l’entreprise se traduirait par une diminution des exonérations de 426 euros, comme l'illustre l’infographie ci-dessous.

L'intégration de la PPV dans l'assiette de calcul des exonérations revient donc indirectement à l'assujettir à contributions patronales, tout du moins pour les salaires bénéficiant d’exonérations générales de cotisations, c’est-à-dire ceux situés entre 1 et 1,6 fois le SMIC (soit entre 1802 et 2883 euros bruts pour un temps plein).

Face à ce constat, il serait pertinent d’envisager d’autres dispositifs de partage de la valeur, comme l’intéressement ou la participation dont le régime fiscal et social n’a pas été modifié.

Attention donc à bien mesurer le coût de la distribution d’une PPV pour vos clients sous peine d’avoir de mauvaises surprises quant au coût global de la masse salariale.

Baisse des aides à l'apprentissage : quel impact pour l'entreprise ?

  • Dans un récent communiqué de presse, le Ministère du Travail indiquait qu’un décret à paraître fixerait le montant des nouvelles aides à l’apprentissage pour l’année 2025.

    Même si ce dernier n’est pas encore publié à l’heure où cet article est rédigé, les nouvelles règles ne devraient plus évoluer.

    Pour 2025, les aides à l’apprentissage devraient donc être les suivantes :

    • Pour les PME et TPE : une aide pouvant atteindre 5 000 € par apprenti
    • Pour les entreprises de plus de 250 salariés : une aide limitée à 2 000 € par apprenti
    • Pour les apprentis en situation de handicap : une aide renforcée à 6 000 €

    Des précisions restent à apporter quant au fait de savoir si tous les diplômes préparés par l’apprenti permettent d’avoir le montant de l’aide maximale ou si cette dernière sera moins importante pour les diplômes les plus élevés.

    Outre ce point, l’article 7 du PLFSS 2025 aura également une incidence sur le montant du salaire perçu par certains apprentis. En effet, à compter de 2025, la part de rémunération de l’apprenti supérieure à 50 % du SMIC, sera soumise à la CSG/CRDS.

    Jusqu'à présent, ces revenus étaient entièrement exonérés, ce qui va se traduire par une diminution directe du pouvoir d'achat pour les apprentis concernés. Cette mesure entraînera une baisse de pouvoir d’achat d’environ 10 euros par tranche de 100 euros de salaire brut au-delà de 50 % du SMIC.

Anticiper et optimiser : un enjeu clé pour les entreprises

  • Face à ces évolutions réglementaires et aux impacts qu’elles peuvent avoir sur la masse salariale des entreprises, adopter une approche proactive dans l’ajustement de sa politique de rémunération devient essentiel. Avec l’augmentation du coût du travail sur certaines tranches de salaire, il est opportun d’explorer des solutions alternatives telles que l’épargne salariale dont le régime fiscal et social reste particulièrement attractif.

    Pour vous accompagner dans ces choix stratégiques, Harmonie Mutuelle met à votre disposition un simulateur qui vous permet d’évaluer l’impact financier des différentes options de partage de la valeur et d’épargne salariale. Un outil précieux pour sécuriser vos décisions et piloter efficacement votre stratégie RH et financière.


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