Quel sera l’impact du PLFSS 2025 sur les entreprises et les salariés ?
Chaque année, le gouvernement présente son projet de loi de financement de la Sécurité sociale : le PLFSS. Dans le contexte actuel de fort déficit, la santé n’échapperait pas à des coupes budgétaires drastiques. Il est notamment prévu de baisser le plafond d’indemnisation des arrêts maladie, de reporter la revalorisation des retraites et de réformer les allègements de cotisations patronales. Comment cette future loi peut-elle peser sur les entreprises et leurs salariés ? On en parle avec Nicolas Morel, Directeur Expertise Règlementaire du Groupe VYV. |
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Que prévoit exactement la nouvelle réglementation pour 2025 ?
N.M : La recherche d’économies immédiates est bien l’objectif principal de ce budget. Concernant les organismes complémentaires, on peut souligner 2 mesures particulièrement inédites par leur ampleur. Elles consistent à transférer la charge de l’assurance maladie vers les complémentaires santé.
Le premier transfert se situe à l’endroit de la santé. Il était d’abord question de transférer 1,1 milliard d’euros aux complémentaires santé en relevant de 10 % la part prise en charge par les organismes communautaires, ce qu’on appelle le ticket modérateur, sur les consultations médicales et les actes des médecins et sages-femmes. Finalement, la ministre de la Santé et de l’accès aux soins a annoncé le 18 novembre que le relèvement du ticket modérateur sur les médecins ne serait finalement que de 5 %, mais que la mesure serait complétée d’un second transfert, concentré cette fois sur le médicament. Avec là aussi une augmentation de la part versée par les complémentaires de 5 %. Il faut préciser que cette décision a été prise sans réelle concertation avec les acteurs représentant les complémentaires santé…
Le deuxième transfert de charges est relativement inédit puisqu’il touche à l’indemnisation des arrêts de travail. Nous constatons tous une forte dérive des dépenses liées à ces arrêts et pour freiner cette évolution, il est prévu de réduire le plafond de rémunération pris en compte pour le calcul de l’Indemnité journalière Sécurité sociale, en le passant de 1,8 SMIC à 1,4 SMIC. Le montant maximal indemnisable de la Sécurité sociale devrait donc passer d'environ 53 € aujourd'hui à 41 € brut demain, générant ainsi 600 millions d’euros d'économie pour la Sécurité sociale, même si le chiffre est contesté parce qu’on parle plutôt de 800 millions d’euros.
Quelles vont être les répercussions financières sur les entreprises et les adhérents ?
N.M : Les mutuelles et les organismes complémentaires se doivent d’avoir des comptes à l'équilibre. Contrairement à la Sécurité sociale, on ne peut pas créer de déficit. Ces augmentations de remboursement et de prise en charge en santé vont inévitablement peser sur les cotisations de nos adhérents, sans améliorer la prise en charge puisqu'il s'agit de répartir différemment les remboursements. Les 600 millions d’euros d’économies sont également à comprendre comme un transfert de charges vers les employeurs, les contrats de prévoyance et donc au final vers le salarié.
Ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale se limite-t-il aux discussions sur les transferts de charges vers les mutuelles ?
N.M : Non, mais il faut d’abord préciser que ces transferts de charges ne figurent pas directement dans le projet de loi : un simple décret signé par la ministre de la Santé permettra de les appliquer. Le projet en lui-même contient un volet de maîtrise des dépenses d’assurance maladie dans les domaines de la radiologie, la biologie et l’imagerie médicale avec un objectif de réduire la dépense de 300 millions d’euros.
2 grandes thématiques sont aussi en réflexion pour l’année à venir, mais non abordée dans le projet de loi.
- Les affections longue durée, avec la volonté de mettre en place un ticket modérateur. 13,7 millions d’assurés sont concernés par ces affections.
- Les dispositifs médicaux, appareillage - pansements, prothèses, location d’appareils respiratoires - dont les dépenses sont en forte hausse. Il existe des pistes de relèvement du ticket modérateur et de création d’un 3e compteur de franchise.
Les ministres de la Santé qui se sont succédé ont toujours été très attachés à la prévention. Que dit le projet de loi 2025 sur ce sujet ?
N.M : On peut se féliciter de l’entrée dans le dispositif de prévention des soins dentaires pour les jeunes de 3 à 24 ans, dès le 1ᵉʳ avril 2025. Jusqu'alors, c'était l’assurance maladie qui finançait à 100 % le « M’T dents ». Nous allons désormais financer ce programme à hauteur de 40 % en le rendant annuel et en menant de véritables actions partenariales avec l’assurance maladie pour permettre un moindre recours aux prothèses dans les années à venir.
Comment les mutuelles se préparent-elles à ces changements sans augmenter le prix des cotisations ?
N.M : C’est un sujet complexe, car augmenter les cotisations est une conséquence de ces modifications réglementaires qui s’imposent à nous. En revanche, nous réfléchissons pour faire modifier le contenu du contrat responsable qui n'est plus forcément adapté aux besoins actuels, avec trop de prestations. Nous avons aussi des actions d’accompagnement de nos adhérents vers une consommation écoresponsable en favorisant par exemple les réseaux de soins, notamment en optique, pour générer de moindres coûts. Nous les aidons aussi à mieux utiliser « Mon espace santé », l’espace mis à disposition par l'assurance maladie.
Pour lutter contre la fraude, le projet de loi permet-il de renforcer la coopération entre l'assurance maladie et les complémentaires ?
N.M : Les complémentaires santé travaillent depuis de très nombreuses années sur le sujet. En ce moment, il y a plusieurs amendements du Gouvernement qui ont été ajoutés au projet de loi pour améliorer collectivement les actions de lutte contre la fraude. Il s’agit donc d’un signe très positif… à condition qu'il soit accompagné d’actions concrètes pour mettre en place des passerelles avec l’assurance maladie.
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