Concrètement, comment agir sur la santé mentale au travail ?
B.B : Il faut d’abord rappeler que la santé mentale est un état de bien-être qui permet à chaque personne de s’épanouir. Dans les organisations, il est important d’avoir une co-construction avec d’un côté des actions collectives menées par la direction et les managers, et de l'autre, des actions individuelles pour que chacun puisse être acteur de son propre bien-être. Cette co-construction doit déboucher sur une vraie démarche de prévention et d’accompagnement des collaborateurs.
Quelles actions les managers et les RH peuvent-ils mettre en place ?
B.B : De quoi s’agit-il ? Quel est le ressenti ? Quels sont les facteurs d’identification de ces risques ? Qui prévenir si une personne est en difficulté ? L’information et la sensibilisation sont primordiales ! Il est important de former le CSE et les managers à la prévention des risques psychosociaux pour qu’ils soient les sentinelles sur ces sujets au sein de l'entreprise.
Un salarié qui souffre d'une pathologie mentale coûte 13.000 euros à l'organisation. C'est donc un sujet crucial à prendre en compte !
B.B : Tout à fait… Tout en sachant qu’aujourd'hui, la prévention et la prise en charge des sujets de santé mentale est en passe de devenir le premier pôle de dépenses des arrêts maladie par la Caisse d’assurance maladie.
Selon vous, le télétravail a-t-il dégradé la santé mentale ?
B.B : Le télétravail ne dégrade pas la santé mentale… mais il peut y contribuer. Pour les entreprises qui l’ont mis en place post-Covid, cela a été facteur d’isolement et de rupture de l’émulation collective, avec en plus la difficulté du retour au bureau. Aujourd'hui, le télétravail est nécessaire ; il suffit de voir dans les grandes villes la perte de temps liée aux problèmes de transport ! L’idée est donc de proposer un mix présentiel / télétravail pour maintenir la cohésion d’équipe et la culture d’entreprise. Cela permet aussi d’identifier plus facilement les personnes potentiellement à risque… qu’il serait difficile d’identifier en cas de télétravail total.
Vous avez fondé en 2018 Moodwork, une solution digitale qui accompagne les salariés dans leurs démarches de bien-être et de santé mentale au travail. Vous avez aussi conclu un partenariat avec Harmonie Mutuelle en vue de proposer votre solution à leurs adhérents. D’abord, comment fonctionne votre solution ?
B.B : Moodwork est né de l'association entre des entrepreneurs et des chercheurs en psychologie, avec pour objectif d’accompagner les agents et les salariés dans leur démarche de santé mentale et de bien-être au travail.
Avec 3 volets :
1. Des outils d’autoévaluation qui permettent à l’individu de comprendre sa situation de bien-être au travail via différents facteurs comme la gestion des émotions, la gestion du stress…
2. Des outils d’apprentissage et de formation pour que chacun puisse travailler sur des thématiques précises comme la gestion du stress ou le droit à l'erreur, par exemple.
3. Un volet d’accompagnement humain. On propose à la personne de pouvoir prendre rendez-vous quand elle le souhaite avec des psychologues, des coachs ou des assistantes sociales.
Quels sont vos atouts spécifiques ?
B.B : Nous sommes au contact d’un peu plus de 150 000 collaborateurs connectés sur l’application dans de nombreux secteurs. Et nous adaptons l’outil par métier. On a créé une version spécifique pour les ouvriers techniciens, les employés de bureau, les managers, mais aussi le personnel soignant, car nous accompagnons des hôpitaux et des cliniques. Une autre force de Moodwork, c’est la partie scientifique avec notamment nos outils d’auto-évaluation qui ont fait l’objet d’études et de publications.
Quel est l'impact de votre solution sur le bien-être des salariés utilisateurs et des organisations ?
B.B : En 2023, nous avons réalisé une étude d’impact auprès d’utilisateurs et de non-utilisateurs. Pour les utilisateurs de Moodwork, le risque d’épuisement professionnel diminue de 20% avec une hausse de 15% de leur niveau de bien-être. Des chiffres très significatifs ! Pour les organisations, nous remontons de manière globale et anonyme des informations sur les différents facteurs de bien-être ou de mal-être décelés dans les équipes. Ce qui permet d’aider l’entreprise pour qu’elle puisse adapter ses pratiques.
Avec votre expérience, quels conseils donneriez-vous aux organisations pour prévenir et prendre soin de la santé mentale de leurs collaborateurs ?
B.B : Il faut avoir une démarche globale et ne pas se restreindre à des actions isolées. Ensuite, il est essentiel de prévenir de manière collective les situations à risque, mais aussi de proposer aux salariés des outils qui leur permettent d’agir personnellement sur leur situation, en toute indépendance du management.